Un fruit stratégique pour l’économie agricole

Riche en vitamines, à cycle de production court et génératrice de revenus, la papaye séduit producteurs, techniciens et investisseurs.
Dans la région de Thiès, l’ingénieur agronome Abdou Wahab Ndiaye et son association And Dolel Niaye Bi (ADN) sont des pionniers de cette dynamique. ADN développe depuis 2022 une production sur 12 hectares à Notto Gouye Diama, concentrée sur la variété Vega, reconnue pour sa haute productivité, jusqu’à 200 kg par pied sur un cycle de deux ans.

Une expertise au service de la terre

Fort de près de quarante ans d’expérience dans le développement agricole, la protection intégrée des cultures et l’agroécologie, M. Ndiaye a créé un cabinet de formation et s’est lancé dans la culture de papaye en combinant rendement et respect de l’environnement.

Les techniques utilisées par ADN incluent :

• Enrichissement organique au fumier naturel et compléments minéraux maîtrisés

• Rotation des cultures pour préserver la fertilité des sols

• Lutte contre les ravageurs (acariens, nématodes, singes)

• Production sans recours aux produits chimiques

Selon M. Ndiaye :
« C’est une culture très productive et à haute valeur ajoutée. Le climat, le soleil et l’eau sont nos plus grands alliés. »

Des producteurs engagés : l’exemple de Fodé Senghor

Dans le Saloum, Fodé Senghor, producteur et fondateur de Secpa, illustre parfaitement la rentabilité de la filière. Sur un hectare planté entre 1 600 et 2 500 pieds, la production peut atteindre plus de 100 tonnes en 18 mois.

Même vendue à un prix bas sur le marché local (350–400 FCFA le kilo), la marge reste très avantageuse après déduction des charges : près de 30 millions FCFA par hectare, selon son estimation.

Très connecté au marché local et aux hôtels de la Petite Côte, il adapte la taille des fruits aux besoins des acheteurs :

• 1 kg à 1,5 kg pour les marchés et ménages

• Fruits plus volumineux jusqu’à 3,5 kg pour la restauration et l’hôtellerie

Il insiste aussi sur la qualité post-récolte : certaines variétés comme la Vega F1 conservent une meilleure tenue, ce qui évite les pertes et rassure les clients.

Pour lui, la demande locale progresse fortement, portée par les vertus nutritionnelles de la papaye — digestion, prévention du cholestérol ou de la prostate — mais la commercialisation reste fragile lors de la saison des mangues où les prix chutent fortement.

Une filière structurée du champ à la transformation

En Casamance, les sols profonds et le climat tropical permettent d’obtenir des fruits de qualité remarquable. La Terre Casamançaise, dirigée par Mamadou Baldé, joue un rôle clé dans cette dynamique en assurant la collecte et la distribution de fruits locaux (madd, ditakh, tool, mangue, papaye) sur tout le territoire, y compris hors saison.

Après la récolte, plusieurs circuits permettent de valoriser la papaye :

• Marché local via les revendeurs

• Distribution nationale et régionale

• Transformation (jus, confitures, fruits séchés) : la voie la plus rentable

Selon M. Baldé, certaines variétés sont privilégiées :

• Solo  : petite, sucrée, idéale à consommer fraîche
• Vega  : volumineuse, parfaite pour la transformation
• Chinos  : très prisée et bien valorisée

Le paradoxe du marché : l’importé face au local

Malgré un produit frais, naturel et sans produits chimiques, les papayes importées s’imposent encore dans certains commerces. Pour M. Ndiaye, l’enjeu est clair :
valoriser, certifier et mieux informer le consommateur sénégalais.

Un message aux jeunes : investir la terre

L’expérience de ces acteurs — Ndiaye, Baldé, Senghor — montre que la papaye est une filière d’avenir, rentable, créatrice d’emplois et compatible avec une agriculture durable.

Selon M. Ndiaye :
« Se lancer dans l’agriculture demande technique, patience et passion. La terre récompense toujours ceux qui la respectent.  »

Où trouver de la papaye et les producteurs au Sénégal